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REMEMBER
BEN BARKA
Affiche Ben Barka, OSPAAAL, 1967, Luis Alvarez
Les manifestations de mars 1965 à Casablanca ont marqué l’éveil politique de la jeunesse marocaine descendue dans la rue, rejoints par leurs parents et le peuple de Casablanca, emplis d’espoirs pour une société qu’ils voulaient contribuer à faire évoluer. Marqués par la violente et injuste répression de l’Etat autoritaire d’Hassan II, les étudiants marocains de Łódź prolongent leurs activités politiques jusqu’en Pologne, notamment au sein de la section Pologne de L’Union Nationale des Etudiants du Maroc (UNEM) qui représente cette jeunesse marocaine politisée.
Quand le leader de la gauche Mehdi Ben Barka est assassiné à Paris en octobre 1965, il préparait activement la conférence Tricontinentale, qui se déroulera à La Havane en 1966, pour la convergence des luttes des mouvements de libération du Tiers Monde. L’organisation de solidarité des peuples d’Afrique, d’Asie et d’Amérique Latine (OSPAAAL) veut lutter contre l’impérialisme, le colonialisme, le racisme et le capitalisme.
En Pologne, les étudiants du Tiers-Monde sont à la fois engagés dans des mouvements de solidarités internationales (ils organiseront des journées de soutien au Vietnam, mais aussi au Black Power ou à la Palestine), attentifs à l’agitation globale du monde avec les luttes agraires ou encore les mouvements de mai 1968, mais aussi très concernés par les luttes nationales et le développement de leurs pays. Devant l’Ambassade du Maroc, les frères Derkaoui, Karim Idriss et Abdelkader Lagtaa protestent et dénoncent la répression qui se durcit. Mostafa Derkaoui au Centre de Langues a même monté une pièce de théâtre intitulée “La Journée du 23 mars” (en référence à mars 1965).
Les films réalisés en Pologne se font l’écho de ces intérêts et engagements, dans une tentative d’un cinéma politique qui soulève des questions sociétales et historiques comme la lutte de Moha ou Hammou Zayani contre les colonisateurs (Amghar de Mostafa Derkaoui), la disparition de Mehdi Ben Barka (Une Ombre parmi d’autres de Abdelkader Lagtaa), mais aussi la solidarité internationale pour la libération des peuples opprimés du tiers monde (Un Jour, Quelque part de Mostafa Derkaoui) et les révoltes de 1968 (Les Gens du Caveau de Mostafa Derkaoui). Des sujets qui jusqu’à aujourd'hui restent encore très peu abordés dans le cinéma marocain et qui manquaient à son Histoire.
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